John Roderick
McDougall

Tunnelier

1883 - 1957

Photo en noir et blanc d’un soldat en uniforme militaire, comportant le kilt, les chaussettes et le bonnet des Highlanders.

Né à Westville dans le comté de Pictou en 1883, John Roderick « J.R. » était le fils de Roderick « Rory » et de Katherine McDougall. Comme son père, « J.R. » est devenu mineur dans les mines de charbon et a déménagé à Glace Bay avec ses parents en 1897 pour travailler à la houillère Dominion no 3. Il commençait ainsi une carrière souterraine qui durera 50 ans Il a épousé Mary Florence « Minnie » Gillis en 1903; et ils ont vécu à la houillère Dominion no 6 (Donkin) et ont eu 13 enfants. Au mois d’août 1916, J.R. s’est enrôlé dans le 246e bataillon de la « brigade des Hautes-Terres de la Nouvelle-Écosse ».

UNE VIE EN PHOTOGRAPHIES

Découvrez la galerie de photos ci-dessous pour en apprendre davantage au sujet de la vie et du service militaire de John Roderick.

LE COMBAT SOUS LA SURFACE
Photographie sépia de six militaires en uniforme. Trois hommes sont assis sur un banc à l’extérieur avec les jambes croisées. Trois hommes sont debout derrière eux.

J.R. McDougall et des collègues du Génie militaire canadien, Corps expéditionnaire canadien, env. 1918. (Photographie gracieuseté de Linda MacDougall Prendergast)

La plupart des hommes qui ont servi au sein du Corps expéditionnaire canadien pendant la Première Guerre mondiale ont servi soit comme fantassin dans l’infanterie, soit aux armes dans l’artillerie. D’autres ont servi dans diverses unités de soutien, y compris ingénieurs, bataillons de main-d’œuvre, colonnes de transport de munitions, unités de service, ainsi que comme médecins et infirmières militaires dans le Corps de santé de l’Armée canadienne. Un petit nombre d’entre eux a également servi dans des compagnies de sapeurs-mineurs (tunneliers) rattachées au Corps du génie royal canadien.

Le début de la guerre de tranchée statique à l’automne de 1914 a engendré la nécessité de nouvelles tactiques dans les champs de bataille du front occidental. Sous la surface, tant les alliés que les puissances centrales ont creusé des tunnels sous les positions de l’ennemi pour détruire leurs défenses et faire avancer notre offensive. Le Nord-Est de la France et l’Ouest de la Belgique où se déroulaient une bonne partie des combats étaient déjà un important territoire de mines de charbon, et l’état du sol y était parfait pour le creusage. Dès le début de 1915, les deux côtés creusaient et contre-creusaient avec intensité.

Les hommes employés dans les compagnies de sapeurs-mineurs (appelés tunneliers ou sapeurs) exécutaient souvent des travaux difficiles et dangereux qui demandaient beaucoup d’habiletés. Des mineurs chevronnés de l’Australie, de la Grande-Bretagne, du Canada et de la Nouvelle-Zélande ont été recrutés pour mener cette guerre souterraine; souvent ignorés, leurs efforts restent inscrits dans le paysage à ce jour. Parmi les centaines d’hommes canadiens qui ont servi dans ce rôle, environ 200 provenaient du Cap-Breton. John Roderick McDougall de Donkin était l’un d’eux.

«TOI ET MOI, NOUS VIVRONS ENCORE HEUREUX ENSEMBLE.»
Photographie sépia d’une vielle voiture. Un homme pose au volant avec un enfant sur ses genoux. Il y a une femme et un petit enfant dans le siège arrière de l’automobile. Un jeune garçon sourit à la caméra à l’extérieur de la voiture, devant la porte du chauffeur.

Visionner des extraits du dossier de service de J.R. au sein du Corps expéditionnaire canadien.

«Quoiqu’il en soit, soit bonne pour les enfants et pour toi. Toi et moi, nous vivrons encore heureux ensemble» -J.R. McDougall à Minnie McDougall

John Roderick avait 33 ans quand il s’est enrôlé dans le 246e bataillon, alors qu’il avait 8 enfants à la maison. Il est allé au Camp Aldershot, en périphérie de Kentville (Nouvelle-Écosse) pour la formation de base avant de traverser l’océan à bord du S.S. Olympic en juin 1917. Arrivé en Angleterre, il est transféré au 185e bataillon (Cape Breton Highlanders). Il est par la suite affecté à la compagnie de sapeurs-mineurs no 3 du Corps du Génie royal canadien au mois d’avril 1918 et envoyé en France.

Le séjour de J.R. au front a été bref. Il a servi sur le terrain jusqu’au mois d’octobre 1918, alors qu’il a été hospitalisé à Boulogne pour une hernie. La guerre était déjà finie quand il termina sa période de convalescence, et on l’a envoyé au camp de rapatriement au parc Kinmel au pays de Galles attendre le transport qui le ramènerait au Canada. Il était présent, mais n’aurait pas participé au soulèvement du parc Kinmel le 4 mars 1919, et il s’est embarqué plusieurs jours plus tard sur le navire qui le ramènera à Halifax.

Après la guerre, John Roderick a repris sa carrière de mineur à la Dominion Coal Company. Il a travaillé dans plusieurs mines dans la grande région de Glace Bay, y compris à Passchendæle, Caledonia, Donkin et New Waterford. Malgré la perte de son œil gauche dans un accident de travail en 1936, il a continué à travailler comme mineur jusqu’en 1947. Il est décédé en 1957 à l’âge de 75 ans.

LES SOLDATS SOUTERRAINS DU CANADA
Photographie en noir et blanc de plusieurs hommes et d’un poney dans une mine de charbon souterraine. Le plafond est très bas et soutenu par des piliers en bois.

Mine, Glace Bay, 1905. (Institut Beaton, Université du Cap-Breton, Numéro de référence : 80-18-4198)

Le Corps expéditionnaire canadien a établi quatre compagnies de sapeurs-mineurs, dont trois qui ont servi en France. Organisée en septembre 1915, la compagnie no 1 a recruté chez les mineurs déjà en service outremer dans les bataillons d’infanterie et a recruté dans les collectivités minières de l’Est du Canada pour compléter ses effectifs. Également mise sur pied en septembre 1915, la compagnie no 2 a recruté dans les collectivités minières de l’Alberta et de la Colombie-Britannique. Enfin, la compagnie no 3 a été organisée à Bailleul, en France au mois de décembre 1915 en absorbant les sections minières des brigades de la 1ère et de la 2ème Division canadienne. La compagnie canadienne de sapeurs-mineurs no 4 a été organisée en mars 1916 et a recruté des mineurs dans l’Ouest du Canada. Elle ne s’est pas rendue en France, mais est restée en Angleterre comme unité de réserve pour fournir des renforcements aux autres compagnies.

Le perçage de tunnels était un travail extrêmement dangereux qui supposait un dur labeur et demandait la connaissance et le savoir-faire d’hommes qui savaient composer avec les effets psychologiques du travail sous la terre. Par conséquent, presque tous les tunneliers ont été recrutés au sein de collectivités minières. Bien que nous n’en connaissions pas le nombre exact, jusqu’à 1 100 hommes pourraient avoir servi dans les compagnies de sapeurs-mineurs canadiennes.

LES MINEURS DE CHARBON DU CAP-BRETON
Photographie en noir et blanc d’hommes dans un convoi de chariots de mine de charbon.

Mineurs de Donkin, env. 1925. (Institut Beaton, Université du Cap-Breton, Numéro de référence : 86-68-16165)

Comme le Cap-Breton était l’une des plus importantes régions de mines de charbon au Canada, environ 200 hommes de collectivités de l’ensemble de l’île ont été recrutés, transférés ou enrôlés pour servir en tant que tunneliers. Parmi ceux-ci, notons Francis Saccary de Bridgeport, Archibald Pilley de Caledonia, Arsène « Archie » Cormier de Chéticamp, Nicholas Kennedy de Dominion, Vincent McDonald de George’s River, John Angus McNeil de Inverness, Walter Butts de Lingan, Thomas Ling de de New Aberdeen, Hector Ross de Northeast Margaree et Daniel Currie de Reserve Mines.

À la fin du mois de décembre 1918, le maréchal Earl Haig a louangé les tunneliers du Canada pour leur important apport à la victoire des Alliés. On a également rendu hommage au succès de six mineurs de Caledonia, tous membres de la 1ère compagnie canadienne de sapeurs-mineurs, pour avoir remporté le premier prix et établi un record du monde dans un concours international de sapeurs.

SOUS LES LIGNES ENNEMIES
On voit dans l’image une section d’une carte de la France de la Première Guerre mondiale qui indique les tranchées et les lignes ferroviaires, les dépotoirs et les structures bâties.

Carte des ordonnances, France, le 20 août 1918. (Institut Beaton, Université du Cap-Breton, Numéro de référence : CARTE 205)

Les compagnies de sapeurs-mineurs creusaient des tunnels où on posait des explosifs, mais ils construisaient également des voies souterraines, des tranchées à câble, des points d’accès à des services et des salles souterraines à des fins de transmission de signaux ou de services médicaux. Dans les endroits qui le permettaient, on a creusé de vastes réseaux de tunnels à l’arrière des lignes des fronts, ce qui rendait possible le déplacement d’hommes et de matériel dans les tranchées du front sans être détecté par les forces ennemies.

Les tunneliers travaillaient dans des conditions extrêmement difficiles sous la terre, dans des espaces froids, sombres, humides, peu aérés et restreints. On creusait à la chandelle et en silence presque complet pour éviter toute possibilité de révéler son emplacement aux Allemands. Pour détecter l’activité et les déplacements de l’ennemi, il fallait écouter attentivement en utilisant souvent des géophones (dispositifs de détection acoustique).

La lutte guerrière souterraine était extrêmement dangereuse, étant donné que chaque jour les explosions, les inondations et les effondrements posaient une menace. Des rencontres inattendues avec des tunneliers allemands (appelés les Pioniere) étaient également possibles, et de nombreux hommes vivaient dans la peur d’une mort soudaine pour cause d’asphyxie, de noyade, d’enterrement ou d’explosion.

Les mines creusées sous les lignes ennemies ont joué un rôle clé dans plusieurs batailles. Le 27 mars 1916, on a fait exploser six mines sous les positions allemandes près de Messines, à proximité d’Ypres en Belgique. La plus grande avait été creusée par la compagnie canadienne de sapeurs-mineurs no 1 à Saint-Éloi et comportait 43 400 kg d’explosifs. L’explosion qu’elle a causée a lancé la bataille de Saint-Éloi, une des batailles les plus chaotiques de la guerre, où le 25e bataillon (Nova Scotia Rifles) a mené sa première bataille.

L’offensive de la Somme, l’une des plus brutales et des plus sanglantes de la guerre, a aussi été provoquée par l’explosion de mines. Au matin du 1er juillet 1916, on a déclenché plusieurs charges explosives posées par des tunneliers britanniques sous des positions allemandes le long de la crête Hawthorn près de Beaumont-Hamel. L’attaque qui a suivie a causé des pertes catastrophiques chez les Alliés, le 1er Newfoundland Regiment étant presqu’entièrement décimé.

Pour se préparer à la bataille de la crête de Vimy, les compagnies de sapeurs-mineurs ont creusé un formidable 20 kilomètres de voies souterraines pour les déplacements à pieds, la circulation de tramways munis de rails pour emmener des munitions aux lignes avant et évacuer les soldats blessés, ainsi que de légers chemins de fer – le tout, à l’insu des Allemands. Le réseau de tunnels à la crête de Vimy a accueilli 24 000 hommes avant l’attaque (le 9 avril 1917), et il était équipé d’éclairage électrique, de cuisines, de latrines et d’un centre médical. Une section de 250 mètres a été conservée et est accessible au public pour rendre hommage au rôle pivot que les compagnies de sapeurs-mineurs ont joué dans la victoire canadienne à la crête de Vimy.

Pendant les mois qui ont mené à la bataille de Messines, les tunneliers alliés ont installé 25 mines massives chargées de plusieurs milliers de kilogrammes d’explosifs sous la crête de Messines que les Allemands occupaient. Elles ont été mises à feu le matin du 7 juin 1917 pour causer une énorme explosion qui a tué 10 000 soldats allemands. La 1ère et la 3ème compagnie canadienne de sapeurs-mineurs ont participé à la préparation et à l’exécution de l’explosion, dont l’électricien devenu sergent, Daniel « Danny » Lynk de Glace Bay, à qui on a décerné la Médaille militaire pour ses actions pendant la bataille.

Après l’été de 1917, la guerre est devenue davantage mobile et la guerre souterraine a diminué. Les membres du personnel des compagnies de sapeurs-mineurs ont été affectés à d’autres unités d’ingénierie ou d’infanterie, alors que quelques-uns ont continué à travailler sur des voies et des abris souterrains pour l’infanterie des premières lignes. Pendant l’offensive allemande au printemps de 1918, on a fait appel à plusieurs unités de sapeurs-mineurs pour servir dans l’infanterie. Alors que cette offensive échouait et que les Alliés lançaient leur dernier assaut contre les Allemands, les compagnies de sapeurs-mineurs ont travaillé pour sécuriser les villes, les villages et les installations capturés, en effectuant notamment de très dangereux travaux pour retirer des tunnels les grandes quantités d’explosifs que l’ennemi y avait laissées.

LE RÔLE INDUSTRIEL DU CAP-BRETON DANS LA GUERRE
Photographie sépia d’une grande usine d’acier prise depuis les quais d’expédition de l’entreprise charbonnière le long du havre de Sydney.

Usine de la Dominion Iron and Steel Company dans le havre de Sydney, env. 1900. (Institut Beaton, Université du Cap-Breton, Numéro de référence : 77-620-754)

Pendant l’été 1914, l’économie du Canada était en récession. Dans l’année qui a précédé la guerre, un taux de chômage élevé poussait les hommes à se joindre à la milice ou à s’enrôler dans les forces armées peu après le début de la guerre. Mais la déclaration de la guerre et les commandes de tout un éventail de matériel militaire passées par le gouvernement – depuis l’acier et le charbon jusqu’à des uniformes et des provisions alimentaires – ont rapidement stimulé l’économie.

L’arrivée de ces massives dépenses gouvernementales pour la guerre a été avantageuse pour tous les secteurs, mais l’industrie lourde fut particulièrement touchée, surtout au Cap-Breton. À l’époque, Sydney et ses collectivités avoisinantes constituaient l’une des plus importantes régions industrielles du Canada. Deux usines d’acier – une à Sydney et l’autre à Sydney Mines – ont reçu de grosses commandes de lingots à traiter pour fabriquer des douilles pour les obus d’artillerie, et, rendu au milieu de 1916, elles en produisaient conjointement plus de 40 000 tonnes par mois.

Les mines de charbon de la région ont également profité de cet élan, car le charbon était la principale source de combustible pour les usines d’acier et le principal carburant des navires marchands qui quittaient le havre de Sydney pour se rendre en Grande-Bretagne avec des cargaisons vitales pour soutenir l’effort de guerre. La Dominion Steel est également devenue le principal producteur de trinitrotoluol, un sous-produit de ses fours à coke, qui était converti en TNT, l’explosif utilisé dans les obus de l’artillerie. À la fin de la guerre, elle en avait produit 3 millions de litres qui avaient été convertis en 19 millions de kilogrammes de TNT. L’agriculture, l’industrie forestière et les pêches ont aussi connu la prospérité pendant la guerre.

Les effets économiques n’ont toutefois pas tous été positifs. Comme un si grand nombre d’hommes s’étaient enrôlés pour le service militaire, on a rapidement constaté une pénurie de main-d’œuvre sur le front domestique. On a embauché des femmes pour combler les brèches dans les usines d’acier, mais leurs salaires moins élevés inquiétaient les hommes qui travaillaient dans l’acier. On les a également empêchées de travailler dans les mines de charbon, ce qui a causé une baisse de la production et une pénurie de produits essentiels. La prospérité de l’économie a causé de l’inflation et, bien que les prix aient grimpé tout au long de la guerre, les salaires n’ont pas suivi. Cela a entraîné une agitation croissante chez les ouvriers, et, à la fin de la guerre et tout au long des années 1920, le secteur industriel a été affligé par des conflits, des fermetures d’usines et de mines et une grave dépression économique.

UNE VIE, ILLUSTRÉE

Découvrez la vie de J.R. grâce à des illustrations de sa vie et de son travail.

On voit J.R. McDougall à l’avant-plan tenant une pelle pour miner du charbon dans une sombre mine de charbon souterraine. À l’arrière-plan, trois mineurs sont en train de travailler en parlant entre eux. Ils sont éclairés par un cercle de lumière.
J.R. dit adieu à son épouse et à ses enfants à l’extérieur au moment où il quitte son domicile pour la guerre. Il est vêtu d’un uniforme militaire et on voit des bagages au sol à l’avant de sa maison.  On voit le carreau d’une mine de charbon de l’autre côté d’un cours d’eau et deux personnes assises dans un bateau à rames.
On voit J.R. en uniforme dans le champ de bataille, en train d’entrer dans un tunnel à partir d’une tranchée avec une pelle à main. Deux hommes en uniformes assortis le regardent descendre dans le tunnel depuis les côtés.
On voit J.R. photographié à genoux dans un tunnel souterrain en train de poser des explosifs. Il a une expression concentrée et déterminée pendant qu’il travaille.
J.R. et trois soldats en uniforme, fusils en main, sont accroupis dans une tranchée, en attendant d’avancer sur le champ de bataille alors qu’il y a une grande explosion et des rafales de coups de feu pas trop loin.
J.R. émerge d’un tunnel entouré de débris dans l’obscurité et recouvert de saletés, mais soulagé d’atteindre la surface au-dessus du sol.
J.R. est assis dans un bunker souterrain en train d’écrire une lettre à envoyer chez lui. Il y a un soldat debout avec son fusil à l’arrière-plan, tandis qu’un autre soldat dort à l’avant-plan.
On voit J.R. alors qu’il est devenu un homme âgé dans sa maison au Cap-Breton. Il est assis seul à une table avec une tasse de thé et une théière en contemplant pensivement la collectivité et le paysage en arrière-plan qu’il voit par la fenêtre par une belle journée ensoleillée. Des photos de famille et des médailles de service militaire sont suspendues comme dans une galerie sur le mur derrière lui.
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